STRASBOURG - Menacé d'extinction à court terme, le Grand Hamster d'Alsace va peut-être pouvoir sortir le museau de son terrier après le renvoi de la France devant la Cour européenne de justice, les associations de défense du rongeur espérant que cette décision fera office "d'électrochoc".
AFP/Archives/Gérard Baumgart
Photo prise le 1er août 1999 d'un grand hamster d'Alsace sortant de son terrier près de Blaesheim dans le Bas-Rhin
"Ce sera peut-être un coup de fouet qui permettra une prise de conscience qu'il faut faire plus", estime Gérard Baumgart, président du Centre d'études, de recherche, de protection de l'environnement en Alsace.
"Tout ce que les associations ont dit depuis des années n'a jamais été pris en compte, maintenant il faut bien cet électrochoc", lâche-t-il.
Il juge favorablement la décision de la Commission européenne de traîner la France devant la Cour de justice à Luxembourg pour son inertie dans ce dossier, alors que le rongeur est menacé d'extinction en Alsace, son dernier territoire.
"C'est un mal nécessaire mais on ne peut s'en satisfaire" car "c'est la marque de l'échec" des plans mis en oeuvre par les pouvoirs publics et régulièrement critiqués par les associations pour leur insuffisance, estime pour sa part Stéphane Giraud, directeur régional d'Alsace Nature.
Pierre Gueth, qui préside l'association SOS Grand Hamster d'Alsace, veut voir dans cette procédure "une bouffée d'oxygène": on "va voir si les autorités françaises vont réaliser le sérieux de la situation" après s'être faites
tancées à plusieurs reprises par Bruxelles.
"La France est alertée depuis 2000 mais ses plans de sauvegarde, dont le dernier (annoncé jeudi, ndlr) par (la secrétaire d'Etat à l'Environnement) Chantal Jouanno, n'ont rien donné", poursuit-il, pointant "mauvaise volonté de l'Etat".
Selon Alsace Nature, moins de 250 individus ont été recensés dans la région en 2009 (contre 500 en 2002 et plus d'un millier en 1999), dont plus de la moitié dans le seul secteur de Geispolsheim (Bas-Rhin).
La survie de l'espèce n'est assurée qu'à partir de 1.500 individus.
Les associations dénoncent en choeur la monoculture du maïs -80% des plaines d'Alsace- et l'étalement urbain comme principales causes de l'extinction du hamster. Pour sa survie, le rongeur aurait besoin d'un territoire protégé de 240.000 hectares alors que l'espèce dispose d'une réserve de 3.490 hectares.
Protégé depuis 1993, la Commission le classe parmi les "mammifères les plus menacés d'Europe".
"Si ça continue comme ça, sa disparition sera très rapide", s'alarme M. Giraud, qui dénonce les projets alsaciens de relance, dont le contournement autoroutier de Strasbourg, "axés sur le BTP" et néfastes au hamster.
La culture du maïs "ne devrait pas dépasser 50% (des surfaces cultivées), le reste étant dédié au blé et à la luzerne", dont le rongeur se délecte, estime le président de Sauvegarde Faune Sauvage Jean-Paul Burget, à l'origine de la plainte qui a débouché sur le renvoi devant la juridiction luxembourgeoise.
Il ne mâche pas ses mots pour fustiger la "monoculture du maïs" et la "sururbanisation" qui ont "pratiquement +foutu en l'air+ le hamster" ainsi que d'autres espèces comme le milan royal, le crapaud vert ou le vanneau huppé.
M. Burget pilote trois élevages de 500 hamsters destinés à être relâchés. "Ces lâchers sont peu efficaces, le biotope est mauvais. Sans compter les prédateurs (renards, buses) qui ont tôt fait de les décimer", peste-t-il.
"J'avoue être hyper pessimiste (...) La population diminue et elle n'est plus viable", soupire Pierre Gueth. "Mais peut-être qu'après ce nouveau coup de semonce, la France va pouvoir redresser la barre..."
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